dimanche 9 octobre 2016

Critique de Kubo et l'Armure Magique



Le samouraï et ses (orig)amis


Jeune studio d’une petite dizaine d’années s’étant révélé avec la superbe adaptation de Coraline, Laika est de retour sur nos écrans après les divertissements relativement mineurs qu’étaient L'Etrange Pouvoir de Norman et Les Boxtrolls.

Mais quel retour ! 
Ce Kubo et l’Armure Magique est la première réalisation de Travis Knight et il va sans dire que le directeur du studio a voulu frapper très fort dès son coup d'essai derrière la caméra, comme s’il était désireux de montrer la voie à son équipe qui, même si elle délivre en permanence des résultats techniquement irréprochables, pèche un peu sur l’aboutissement narratif  de ses dernières créations.

Cette fois, difficile de faire la fine bouche tant Kubo nous happe d’entrée avec son introduction des plus bluffantes, où le narrateur (le héros lui-même) nous recommande de ne plus cligner des yeux de toute son histoire pour éviter un grand malheur.
Un conseil qui prête à sourire mais qui prend tout son sens dès lors que l’immense beauté du long-métrage se déploie à l’écran dans un crescendo on ne peut plus captivant.

Tel un artiste de Laika donnant vie à ses figurines en image par image, Kubo est un conteur hors-pair utilisant son shamisen (banjo japonais) et ses origamis pour faire vivre de belles histoires à un public assidu
Mais une malédiction l’empêche de rester loin de son abri à la tombée de la nuit sous peine de se faire rattraper par les démons venus d’un périlleux passé… Evidemment, un imprévu empêche le jeune garçon de rentrer chez lui au crépuscule, l’entraînant alors dans une aventure où souvenirs et quête d’identité s’entrechoquent pour faire voler en éclats toutes ses certitudes.

D’une richesse visuelle et thématique rarement atteinte dans le cinéma d’animation, Kubo et l’Armure Magique (and the Two Strings en VO, un titre beaucoup plus juste et métaphorique) est ambitieux et s’inscrit avec brio dans la tradition des récits de fantasy épique à la J.R.R. Tolkien ou C.S. Lewis tout en empruntant aux codes du film de samouraï et à la mythologie japonaise
Ce mélange magique prend vie devant nos yeux dans un tableau fourmillant de détails animés à la perfection. 
Laika assoit définitivement son statut de maître de la stop-motion  et on ne peut que souhaiter l’ouverture prochaine d’une expo dédiée à l'ensemble de son œuvre pour pouvoir en admirer les trésors de plus près (votre blogueur vous invite d’ailleurs à regarder la vidéo en fin de critique pour constater le boulot colossal abattu pour créer un tel projet).

Malheureusement, s’éloigner des techniques mainstream et des poncifs lourdement régurgités dans le cinéma pour enfants (ou devrait-on dire, infantilisant) est une pratique qui ne semble pas vraiment payer puisque Kubo est à l’évidence un échec commercial alors que l'unanimité critique est au rendez-vous. 
La faute probablement au faible budget alloué à la promotion du film malgré la présence au casting vocal de pointures telles que Charlize Theron, Matthew Mcconaughey, Rooney Mara et George Takei, par ailleurs tous impeccables.
On ne peut alors s'empêcher  de parcourir d'un regard désabusé cette salle quasiment vide autour de soi et de se demander pourquoi le nouveau Laika n'est pas un succès retentissant et immanquable comme le sont devenus (souvent à juste titre) les Pixar. Les voies du marketing sont décidément impénétrables...

Comment donc vous encourager à vous ruer en salle pour admirer la dernière merveille de ce génial studio
En clamant que vous n’avez certainement jamais vu un film d’animation traiter avec autant de justesse du deuil et de la puissance des souvenirs pour se (re)construire en tant qu’humain ?
En vous jurant que le spectacle visuel et sonore est absolument sublime, riche en humour, émotion et action?
Ou bien, disons tout simplement que Kubo et l’Armure Magique est mon premier chef-d’œuvre de 2016
Une ode à la mémoire avec un grand M qui restera, à coup sûr, dans celle des valeureux spectateurs ayant pris le risque de s’aventurer en salles pour déballer ce véritable cadeau que le Cinéma leur offre sur un plateau d'origami.


Note :  10 /10


Le making of Kubo



Conseillé...
Déconseillé...

    -Aux amateurs d'animation au sens large.

    -Aux férus de culture japonaise.

    -A ceux qui pensent que l'animation, ce n'est que pour les mioches.
      

   -Vous êtes toujours là? Vraiment!? Kubo n'attend plus que vous.
    





Prochaine critique: Captain Fantastic